Une peinture lyrique : les quatre éléments

L’eau, l’air, la terre, le feu …

L’eau, l’air, la terre, le feu … ces quatre éléments dont est constitué notre monde hantent la vision du peintre comme une obsession exaltante. Non point pour le ronger jusqu’à la morbidité, non point l’accabler et le détruire, mais au contraire pour susciter en lui, développer, intensifier, diversifier une méditation constante sur l’univers, ses mystères, ses puissances et ses évolutions…

Pour Michel DUFOUR le passage d’un élément à un autre, d’une nature à une autre, d’un état à un autre est la base de sa contemplation du monde. Ambiguïté des délimitations entre deux domaines : ici un feu liquide, là mer et sable mélangés. Ailleurs l’air, coloré par des cendres ou des étincelles, remué par des vents, des tornades, des tourbillons, tout juste frémissant au-dessus d’un brasier, balayant toute la toile au-dessus d’une étendue d’eau, se faisant ciel dans les hauteurs…

Si le travail de l’artiste cultive cette ambiguïté des zones de couleurs, avec leurs empiètements, leurs mélanges, en un mot leur fusion, c’est que sa méditation sur le monde lui a montré la proximité –mieux : l’interpénétration, parfois même l’interchangeabilité- des éléments. Comme dans une passion amoureuse, leur apparente lutte n’est qu’un aspect de leur harmonie. La stabilité de chacun n’est que temporaire. Des circulations de forces s’établissent, des cycles de destruction et de régénérescence, de mutations perpétuelles, de métamorphose comme fondement même de la vie. C’est pourquoi, traduite en couleurs plus qu’en formes, la peinture de Michel DUFOUR qui reflète strictement sa pensée est balayée de courants, de passages violents, de cascades, de paysages parfois à l’allure de cataclysmes paisibles –ou tout au contraire de grandes plages de calme où l’immobilité des éléments semble attendre la prochaine déstabilisation, laquelle ne sera pas destruction, anéantissement, mais bien recréation, renaissance sous une autre forme…

Tout ce qui vous est montré, c’est notre terre dans ses divers états, ce sont des paysages ou des sujets qui nous sont parfaitement familiers. Mais rien de photographié, rien de reproduit. Ce sont les rythmes de ces paysages, la sérénité de leur bouillonnement interne qui nous sont révélés, leurs flux et leurs reflux secrets. D’où le dynamisme de cette peinture, d’où ses grands souffles, d’où ses grands mouvements qui emportent la matière avec l’esprit.

Lucette Desvignes, écrivain